15/03/2016

L'autobiographie de Philip K Dick


Au cimetière de Fort Morgan, Colorado, Jane Dick a attendu cinquante-quatre ans son jumeau. Philip Kindred Dick l'a rejointe le 2 mars 1982.
Phil est un enfant mélomane, agoraphobe, angoissé, passionné de lecture.
On n'est pas étonné qu'il ait lu Poe, Lovecraft, Kafka.
Il se marie avec une cliente d'University Music, le magasin de disques où il bosse, puis une sympathisante communiste, une voisine riche qui rêve de faire de lui un écrivain classique, divorce de toutes, s'installe avec la femme d'un écrivain, est amoureux de toutes les femmes qu'il rencontre.
Il mange longtemps du cheval - nourriture de paria - acheté dans une boutique d'aliments pour chiens, vivant mal de ses livres.
On lui colle une réputation de drogué alors qu'il ne touche que tardivement au LSD, ne prenant que de la mescaline, des cocktails de pellules, Serpasil, Semoxydrine, Benzedrine, pour tenir le coup et écrire, écrire, écrire.

En 1962, il obtient le Prix Hugo avec Le Maître du Haut Château.

Au début des années soixante-dix, il s'installe à San Rafael et le 707 Hacienda Way devient le repaire de tous les freaks de Californie, un refuge pour camés et jeunes marginaux. Le 17 novembre 1971, l'immense classeur blindé où il cache ses trésors d'enfant est détruit.

Phil vit dans des univers parallèles, dialogue avec ses doubles, est constamment submergé par des signes, des rêves, des prémonitions. Il passe les huit dernières années de sa vie à écrire l'exégèse de son œuvre en dialoguant avec Horselover Fat, son double.

Blade Runner, l'adaptation par Ridley Scott de son roman Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? amène enfin de l'argent.
Le film est sorti en 1982.
Des voisins le retrouvent chez lui, par terre, inanimé. Attaque cérébrale.
Le coma se prolonge jusqu'à ce qu'on le débranche.
Edgar Dick, le vieux père, vient chercher le corps de son fils pour l'emmener à Fort Morgan, dans la tombe où il retrouve Jane.

Cette biographie publiée par Emmanuel Carrère en 1993 est excellente. L'écriture est à la hauteur du personnage dont elle raconte la vie.
On retrouve la puissance évocatrice de L'adversaire, de La classe de neige.
Il montre un K Dick complexe, drogué, gourou, schizophrène, paranoïaque comme l'a dépeint la légende, mais aussi sensible, acharné de travail, généreux, vivant dans son œuvre tout autant que dans la réalité. Un artiste écorché incarné en auteur de SF.
Je suis définitivement phildickien et j'ai envie de relire Ubik.

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