03/12/2017

Les satiriques

Dépôt de plainte

Veuillez parler plus fort, je ne vous entends pas !
C'est pour une plainte.
Pour quoi faire ?
J'ai été agressé dans la rue...
Pardon ? Articulez, on entend rien.
Je voudrais porter plainte pour agression !
Calmez-vous ! Pas la peine de gueuler non plus. Vous allez péter l'interphone. Je vous écoute.
Pouvez-vous m'ouvrir s'il vous plaît...
Il est tard. On ouvre que pour des urgences. J'espère que c'est le cas.
Je pousse un oui désespéré.
La porte s'ouvre. Je cherche partout.
Il y a quelqu'un ?
On arrive.
La voix vient d'une porte au fond du commissariat.
Un policier en sort et s'installe à l'ordinateur.
Papiers d'identité.
Je tends ma carte qui reste sur le comptoir.
Je le regarde taper sur le clavier sans lever la tête de ses touches.
Enfin une main s'empare de ma carte qui disparaît sous le guichet.
Il lit mon nom et mon prénom en détachant bien les syllabes comme un enfant qui apprend à lire.
Je vous écoute...
Comme je vous ai dit, j'ai été agressé dans la rue...
Quelle rue ?
Je ne sais pas. Juste là derrière. Je sais pas le nom de cette rue.
Vous n'habitez pas le quartier ?
Si... enfin non... pas très loin...
Et donc ?
Ils étaient deux.
Vous les avez vus ?
Non c'est allé trop vite.
Donc vous savez pas s'ils étaient deux.
Si... deux je pense... ils étaient pas tous seuls...
Vos propos sont totalement incohérents. Vous avez bu ?
Un peu. Je sors de chez des amis.
Et vous voulez porter plainte ! Vous êtes sûr au moins que vous vous êtes pas fait ça tout seul ?
Sûr.
On vous a volé quelque chose ?
Non.
Vous venez pour quoi alors ?
Ils m'ont frappé. A la tête.
Le policier lève la sienne. Il fait une grimace puis replonge sous le comptoir.
Tenez.
Il me tend ma carte.
Et pour ma plainte ?
Vous voulez faire une main courante ?
Non ! Je veux déposer plainte.
Ça va pas être possible. Il faudra repasser demain. L'OPJ n'est pas dispo.
Vous pouviez pas le dire avant ?
Pardon ? On reste correct ! C'est vous qui avez insisté.
Demain je peux pas. Il sera dispo quand ?
Vous voulez attendre ? Ça va être long.
Combien ?
Jusqu'à demain matin, vous feriez mieux de repasser.
Mais c'est pas possible. Qu'est-ce qu'il fait ?
Il est pas là. Il dort. De toute façon, demain matin ça sera pareil. L'OPJ ne fera rien tant que vous ne serez pas allé à la médecine légale.
La quoi ?
Vous devez vous faire examiner par un médecin légiste. Dans l'état où vous êtes, vous auriez dû aller directement aux urgences au lieu de perdre votre temps ici. Dans une heure, vous avez plus un gramme de sang dans le corps vu comme ça pisse.
Ah...
Vous connaissez le chemin, c'est facile y'a pas besoin d'interphone.
Merci.

2 commentaires:

franaut a dit…

Ça sent le vécu…

Sudème a dit…

A peine mon cher Frann.
Le vécu a tellement été moisi qu'il dissout la fiction.
Il faudra beaucoup de ponts et de l'eau à y faire couler pour en nourrir l'écriture.