Je relis John Fante. Le
père encore plus immature
que le fils. Mais bon, quel âge avait-il lorsqu'il a écrit ce
bouquin ? L'âge de son héros récurrent, Arturo Bandini. Une
vingtaine d'années.
En fait non ! Il l'a
publié à l'âge de trente ans, en 1939. Mais il se remémore le
jeune paumé qu'il était, perdu à Los Angeles, à Bunker Hill,
pauvre, amoureux, fou d'écriture et de célébrité.
On ne peut pas raconter
ce livre.
Demande à la
poussière.
C'est la vie misérable
et grandiose d'Arturo Bandini. Ses hauts et ses bas. Ses laideurs et
ses illuminations. C'est surtout l'écriture de Fante, mêlant le
pathétique au comique, le lyrique au sordide.
Demande à la
poussière est un titre si poétique.
La poussière du
tremblement de terre de Long Beach (1933) que Bandini attribue à son
commerce charnel avec l'inquiétante Vera Rivken. La poussière de
ses mots dont il connaît l'envers mais qui le maintiennent en vie,
tapissant le décor vide de son existence.
La poussière des
rencontres, des existences côtoyées, frôlées, recherchées.
Celle du voisin,
Hellfrick, bouffeur de barbaque monomaniaque et fauché.
De Sammy le barman du
Columbia Buffet, rival détesté en amour et ridicule en
écriture.
De Hackmuth, son dieu
éditeur, aux dollars providentiels, à qui il écrit des
lettres-fleuves qu'il métamorphose en nouvelles publiées en
magazines.
Et bien sûr, de Camilla
Lopez, la Mexicaine, serveuse au Columbia Buffet, son double
féminin qu'il humilie et vénère à la fois, sa Sainte-Vierge et sa
pute.
Il a si peur des filles,
de celle-ci en particulier, de ce qu'il pourrait ne pas devenir, de
lui-même, de ce qu'il représente aux yeux de l'Amérique.
Bandini est touchant car
il essaie de vivre, d'accepter son destin, de le rêver, avec
maladresse, fougue, méchanceté... et Fante, derrière lui, est
implacable.
John Fante in a photo dated 1937. (Photo courtesy of the Los Angeles Public Library Photo Collection) |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire